Article complet : Wolters Kluwer – ACE Comptabilité, fiscalité, audit, droit des affaires au Luxembourg ACE 2019/7
Il appartenait au Luxembourg de transposer avant le 11 juin 2019 la nouvelle directive européenne (UE) 2017/828 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 modifiant la directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l’engagement à long terme des actionnaires (« la Directive SHRD II »).
Le Règlement d’exécution (UE) 2018/1212 de la Commission européenne du 3 septembre 2018, qui fixe les exigences minimales pour la mise en œuvre de ces dispositions concernant l’identification des actionnaires, la transmission d’information et la facilitation de l’exercice des droits, ne sera quant à lui applicable dans les Etats membres qu’à compter du 3 septembre 2020.
C’est finalement le 10 juillet 2019 qu’a eu lieu le premier vote constitutionnel sur le projet de loi luxembourgeois de transposition de la Directive SHRD. Une demande de dispense de second vote a été introduite.
Sans surprise, le législateur luxembourgeois prévoit de transposer fidèlement l’ensemble de la directive en exerçant les options en faveur des entreprises.
Cette nouvelle loi s’appliquera aux sociétés de droit luxembourgeois dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé et celles dont les titres sont négociés sur un marché réglementé d’un Etat qui ne fait pas partie de l’Union qui l’ont déclaré applicable par une référence expresse dans leurs statuts. Elle ne s’applique pas aux organismes de placement collectif ni aux sociétés coopératives.
Elle vient notamment modifier / compléter :
· la loi du 24 mai 2011 concernant l’exercice de certains droits des actionnaires aux assemblées générales de sociétés cotées,
· la loi du 10 mai 2016 relative aux obligations de transparence des émetteurs,
· les X Principes de gouvernance d’entreprise de la Bourse de Luxembourg.
Les principales modifications législatives sont les suivantes :
Introduction d’un cadre permettant aux sociétés cotées d’identifier leurs actionnaires et de faciliter l’exercice du droit de vote
Une communication complète et en temps opportun de l’information destinée aux actionnaires doit être faite par la société – ou par l’intermédiaire - sous forme d’un lien sur le site internet de la société ou par la transmission directe des informations à l’actionnaire.
Les actionnaires de sociétés cotées devront désormais recevoir de la société une confirmation de réception des votes effectués électroniquement. L’actionnaire pourra par ailleurs demander, dans un délai maximum de deux mois après l’assemblée générale, une confirmation que son vote a bien été enregistré et pris en compte par la société si cette information n’est pas déjà à sa disposition.
Transparence des coûts
Les intermédiaires doivent désormais rendre publics les frais applicables aux services liés à l’identification des actionnaires et la facilitation du droit de vote, lesquels doivent être non discriminatoires et proportionnés par rapport aux coûts réellement engagés.
Transparence en matière de politique des investisseurs institutionnels, gestionnaires d’actifs et des conseillers en vote
La politique d’engagement des actionnaires développée par les investisseurs institutionnels et les gestionnaires d’actifs devra être rendue publique et décrire la manière dont ils intègrent l’engagement des actionnaires dans leur stratégie d’investissement.
Les conseillers en vote devront, quant à eux, rendre public gratuitement sur leur site internet le code de conduite qu’ils appliquent et faire un rapport sur l’application de ce code.
Renforcement du contrôle des actionnaires sur la rémunération des administrateurs
Les sociétés cotées devront établir une politique de rémunération, laquelle doit être claire et compréhensible et présenter au minimum les éléments listés (consécration du principe du « Say on Pay »).
Cette politique de rémunération devra être rendue publique sur le site internet de la société et accessible pendant au moins dix ans.
Les actionnaires de sociétés cotées pourraient désormais bénéficier du droit d’approuver en assemblée générale la politique de rémunération des dirigeants avant sa mise en œuvre (vote ex ante) au moins tous les quatre ans et lors de tout changement important. Le législateur luxembourgeois a toutefois prévu que ce vote est purement consultatif, sauf si les statuts stipulent qu’il est contraignant.
Par ailleurs, les actionnaires de sociétés cotées auront le droit, lors de chaque assemblée générale annuelle, de recevoir un rapport exhaustif sur la rémunération octroyée ou due, au cours du dernier exercice, à chaque administrateur conformément à la politique de rémunération. Toutefois, dans les PME, le législateur luxembourgeois a prévu qu’il s’agira d’une simple discussion lors de l’assemblée, séparée de l’ordre du jour.
Renforcement du contrôle sur les transactions avec les parties liées
Les transactions importantes avec les parties liées (au sens de la norme comptable IAS24) devront être soumises soit à l’approbation des actionnaires soit à celle de l’organe d’administration ou de surveillance.
Le législateur luxembourgeois a choisi de définir la transaction « importante » en tenant compte de la nature de la transaction et de la position de la partie liée en faisant référence à la notion "d’impact significatif sur les décisions économiques des actionnaires".
Le législateur luxembourgeois a utilisé l’option permettant d’exclure cette obligation pour
· les transactions conclues dans le cadre de l’activité ordinaire de la société et aux conditions normales de marché,
· celles conclues entre une société et ses filiales détenues à 100% ou lorsqu’aucune autre partie liée à la société ne possède d’intérêt dans la filiale,
· celles concernant la rémunération des dirigeants octroyée conformément à la politique de rémunération,
· celles conclues par des établissements de crédit sur la base de mesures adoptées par la CSSF,
· celles proposées aux mêmes conditions à tous les actionnaires lorsque la protection des intérêts de la société est assurée.
Introduction de sanctions
Les dirigeants seront solidairement responsables de tous les dommages résultant de la violation des obligations qui leur incombent en vertu de la loi. La Chambre de Commerce était opposée à cette disposition et a demandé sa suppression.
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